Tournée des piquets dans le Brabant flamand : « Jamais une grève n’avait été aussi bien suivie »

Dès 5 heures du matin, les équipes du PTB étaient fin prêtes pour leur tournée des piquets de grève dans le Brabant flamand. Des équipes chaleureusement accueillies dans toute la province. Ci-dessous un petit aperçu de cette journée de résistance et de détermination autour des braseros...

Il est six heures lorsque nous arrivons au piquet de Caterpillar à Grimbergen. L’accueil qui nous est réservé est des plus chaleureux. Ahmed, qui nous y accompagne en voiture, y était délégué FGTB il y a deux ans et c’est avec un immense plaisir qu’il retrouve ses collègues. Le piquet est constitué d’une trentaine de personnes, délégués et militants. Plus de la moitié des travailleurs sont en grève et ne sont pas venus travailler. Selon le délégué principal de la FGTB, ce sont surtout les mesures prises par le gouvernement en matière de pension qui fâchent les travailleurs. Beaucoup sont tout simplement contraints de tirer un trait sur leurs projets de retraite. Nous n’avons dès lors aucune difficulté à faire circuler notre pétition contre la pension à 67 ans. La plupart sont déjà convaincus et n’hésitent pas à signer. Au moment de partir, le délégué principal nous confie que jamais auparavant une grève n’avait été aussi bien suivie chez Caterpillar à Grimbergen.

Étape suivante, Fabricom, une filiale de GDF Suez établie un peu plus loin. Devant les portes de l’usine se tient un imposant piquet composé de syndicalistes rouges et verts. Ici tout est bloqué par un grand feu et des palettes. Les rares voitures qui se présentent sont invitées à faire demi-tour. Marc Verhoeven, délégué principal SETCa, est comme il le dit lui-même un « syndicaliste de deuxième génération », puisque son père était lui aussi syndicaliste. Avec lui, nous nous rassemblons autour des braseros où nous savourons de délicieux croissants avec en fond sonore Bob Marley et Nirvana. Bruno Usewils, délégué principal FGTB, explique qu’il a réuni dans le réfectoire les travailleurs des différentes équipes pour les informer des projets du gouvernement. Ce qui, sans aucun doute, les a renforcés dans leur conviction. Fabricom GDF Suez emploie près de cinq mille personnes, réparties sur plusieurs sites. Des syndicalistes des autres établissements et notamment du site de Gand sont présents au piquet. « La semaine dernière, nous étions au piquet dans la Zone du Canal à Gand où tout était complètement bloqué » raconte avec un accent gantois prononcé un jeune délégué visiblement ravi.

Nous nous rendons ensuite au Makro à Machelen. Là aussi, tout est à l’arrêt, le magasin est fermé. Des renforts venus d’autres entreprises et services syndicaux se sont joints au piquet. L’entrée au parking est bloquée par un amas de caddies. 

À Vilvoorde, nous terminons notre tournée par une visite au piquet majoritairement rouge et vert de Komatsu Europe. À notre arrivée, le délégué SETCa, Geert Ooms, s’adresse à notre petit groupe en ces termes : « Haha, des membres du PTB, je suppose. » Il poursuit : « Le gouvernement trompe purement et simplement l’électorat. Si le gouvernement campe sur ses positions, nous irons plus loin. Début janvier, nous prévoyons une nouvelle grande manifestation à Bruxelles et une nouvelle grève générale. Aujourd’hui, nous avons constitué un piquet avec des délégués uniquement. La société emploie une petite centaine de personnes, ceux qui voulaient venir travailler aujourd’hui pouvaient encore le faire, mais la semaine prochaine nous serons plus fermes. Ces actions sont pour moi très différentes de celles menées contre le Pacte des générations. Il ne faut pas non plus oublier que le gouvernement ne fait que poursuivre ce que le gouvernement et les socialistes ont commencé ». L’ambiance est très conviviale. Si on entend de temps à autre éclater un pétard, ce sont surtout les klaxons de camions qui retentissent en guise d’encouragement. Nombreux sont les chauffeurs à saluer le piquet et à lever le pouce ».

« De Wever décide de tout »

Chez Danone à Rotselaar, ils sont une vingtaine de syndicalistes à former un piquet. L’équipe qui rend visite au piquet Danone est chaleureusement accueillie. Les grévistes n’ont pas oublié que l’an dernier le parti était déjà venu les soutenir lors de leurs actions contre les projets de la multinationale et qu’il leur avait fourni des renseignements financiers très utiles. Aujourd’hui, sur les trois équipes d’environ trente travailleurs, seules quatre personnes se sont présentées, il s’agit des « quatre chefs d’équipe sur qui le patron a fait pression », explique-t-on au piquet. Les mesures qui fâchent le plus sont la pension à 67 ans, le saut d’index et l’absence de perspectives d’avenir pour nos jeunes.

Chez Duracel à Aarschot, sur les 450 travailleurs seule une dizaine sont venus travailler. De nouveau, l’accueil réservé à l’équipe du PTB est cordial. Ils sont une trentaine de grévistes à se réchauffer autour des braseros dans la joie et la bonne humeur. Ici aussi on distribue des pâtisseries. Mais cela ne diminue en rien leur détermination. Line De Witte de Comac lance l’avertissement suivant à l’adresse du gouvernement : « Toutes les mesures sont décidées par De Wever à Anvers. S’il refuse de céder, nous bloquerons les carrefours et les autoroutes ». 

Poulets plumés et pommes vertes acides

À Louvain, sur la Place des Martyrs, ils ont été nombreux à répondre à l’appel de la plateforme « Hart boven Hard ». Près de deux cents cyclistes ont rendu visite aux différents piquets de grève dans le quartier de la gare. Charles Ducal, notre poète national, était là lui aussi. C’est ensuite le tour de l’auditoire De Valk, au centre-ville, où sont distribuées des pommes vertes acides et où le président de la CSC flamande monsieur Leemans est venu prononcer une allocution. Le personnel de l’Alma, le restaurant universitaire est lui aussi en grève. Les cyclistes ont ensuite pris la direction de la brasserie ABInBev, où un important groupe de grévistes distribue des pâtisseries dans une ambiance chaleureuse et conviviale et sous une pluie de plumes faisant référence au « poulet plumé » de la FGTB. 

Après avoir fait la tournée des piquets, deux cars de la FGTB, l’un transportant des syndicalistes francophones, l’autre des syndicalistes néerlandophones, arrivent à Haacht. Ici aussi les plumes sont de la partie, en guise de solidarité. Le secrétaire FGTB Rudy De Leeuw s’est adressé aux militants et des poires ont été distribuées aux passants.

Une grève bien suivie dans les services publics

Aux chemins de fer, la grève a débuté le dimanche soir à 22.00 heures. Les trains étaient complètement à l’arrêt dans toute la province. De même aucun bus de la compagnie De Lijn n’est sorti des dépôts, les seuls bus en circulation étaient des bus appartenant à des compagnies de transport privées. Même chose au centre de tri postal où la grève était quasi générale (95% de grévistes) et où l’entrée était bloquée par d’importants piquets. Quant aux bureaux et bâtiments administratifs, là aussi cela faisait des années qu’une grève n’avait plus été suivie aussi massivement. Le VAC était barricadé par des barrières métalliques, tout était à l’arrêt. Même scénario à la maison provinciale où les piquets étaient également importants. Ici le secteur LRB de l’ACOD avait fermement pris les choses en mains. Des délégations du secteur LRB du Limbourg étaient même venues soutenir leurs collègues. À la gare de Louvain, l’idée du gouvernement d’instaurer un service minimum ne plaît pas. La grève a été massivement suivie et des piquets étaient présents. Ce qui était frappant c’est de voir qu’à de nombreux endroits des grévistes venus d’autres entreprises ou provinces étaient présents pour soutenir leurs collègues du Brabant flamand. C’est notamment le cas dans les services publics, mais aussi à la centrale sidérurgique et au Macro de Machelen. On ainsi vu devant les garages des bureaux de la KBC près de la gare de Louvain des délégués du Delhaize. Dans les bureaux de l’administration, le travail était pratiquement à l’arrêt. Le mouvement de grève a aussi été suivi dans l’organisme public flamand, De Watergroep, qui alimente en eau potable une grande partie de la Flandre. Le Cadol à Heverlee, où sont logés les services techniques, était également à l’arrêt et là aussi se trouvait un piquet. Un piquet d’une vingtaine de grévistes était également présent devant l’établissement De Watergroep à Tirlemont. Au centre de formation de l’office flamand de l’emploi, 80% du personnel étaient en grève ou absents. Vers 10.00 heures on a vu arriver dans les locaux de l’ACOD, dans la Maria Teresiastraat, plus de deux cents militants et grévistes des services publics auxquels s’est adressé le leader de l’ACOD, Chris Reniers, dans un discours tourné vers le national et déterminé.

« S’ils ne cèdent pas, nous ne céderons pas non plus »

Après avoir rendu visite aux différents piquets, les quatorze équipes de soutien louvanistes se sont réunies dans le courant de l’après-midi au secrétariat du parti et ont été ravies d’apprendre que la grève avait connu un franc succès. En effet, la grève était totale chez Terumo à Haasrode, chez Sapa à Landen, chez Brucargo à Zaventem, chez Bosch à Tienen... Partout la même détermination unanime : « On ne peut pas s’arrêter là, il faut continuer ». Certains sont même prêts à faire grève au finish après le 15. Chez Harol, on clame que « même si des négociations sont organisées, on ne lâchera rien tant qu’ils puiseront dans nos poches ! S’ils ne cèdent pas, nous ne céderons pas non plus ! » Chez Coca-Cola à Londerzeel et chez Toyota à Diest, la grève était presque totale.

Chez Citrique à Tirlemont, le piquet comptait entre 30 et 40 grévistes. Notre équipe a d’abord dû passer par un barrage filtrant avant d’arriver au piquet. Dans une ambiance joviale, syndicats rouge, vert et bleu commentaient ensemble la situation autour d’un feu ardent. À Hoegaarden, non loin de Tirlemont, le site d’ABInbev est lui aussi à l’arrêt. Les patrons avaient décidé de tout fermer, comme à Louvain.

En conclusion, on peut dire que les grévistes du Brabant flamand ont flanqué une bonne raclée au gouvernement De Wever-Michel. Et même si le mouvement n’était pas suivi de la même manière partout, on nous a assuré à tous les piquets que le 15 « tout serait bel et bien à l’arrêt et paralysé, car cela ne peut plus durer ».