Climate Express : mettre la pression sur les décideurs

Rassembler d’ici la fin de l’année 10 000 personnes en Belgique pour se rendre à la Conférence climatique de Paris, tel est le défi lancé par Climate Express, qui veut réunir lutte sociale et lutte écologique au sein d’un même mouvement.Le vendredi 15 novembre 2013, gare de Bruxelles-Midi, 700 personnes venues de tous horizons – syndicats, mouvements écologiques, organisations Nord-Sud, etc. – embarquaient sur le train à destination de Varsovie, où se tenait la conférence internationale des Nations Unies sur le climat.

On peut affirmer que cette conférence climatique a été un échec. Alors que l’horloge de la dégénérescence climatique continue de tourner impitoyablement, les dirigeants ne font rien. Aucun accord climatique raisonnable et contraignant n’a été signé.

Lorsque, quatre jours plus tard, après un voyage en train de 20 heures et une courte nuit de sommeil, les 700 Belges étaient de retour à Bruxelles-Midi, quelque chose avait changé dans leur cœur et dans leur tête. Ensemble, ils avaient manifesté pour réclamer un accord climatique socialement juste et économiquement responsable. Durant quatre jours, ils s’étaient plongés dans des discussions et des actions. Ils avaient échangé leurs idées, leurs expériences et rentraient à la maison débordant d’enthousiasme et fermement décidés à ne pas laisser se défaire les liens qu’ils venaient de forger.

Bram Sercu était à bord du train pour Varsovie, à l’époque en tant que président de la JNM, l’association des jeunes pour la Nature et l’Environnement. Aujourd’hui, il est, en tant que vice-président du mouvement Climate Express, un de ceux qui ont décidé de poursuivre le projet.

« Ce voyage en train pour Varsovie était très inspirant, raconte-t-il. Imaginez, passer deux fois 20 heures dans un train avec autant de monde, c’était tout simplement magnifique. En fait, la manifestation à Varsovie n’avait rien de sensationnel. Pour dire la vérité, la plupart des manifestants étaient des Belges. (Rires) Mais heureusement, tous sont rentrés satisfaits, puisqu’en tant que mouvement, nous revenions plus forts. »

On peut donc dire que ce jour-là, la gare de Bruxelles-Midi n’était pas un terminus, mais au contraire le début d’un mouvement.

Justice sociale et nature en équilibre

« Tout le monde, à quelques exceptions près, est au courant du problème climatique. Ce n’est pas neuf. Le défi consiste à trouver une voie d’avenir. Ce que nous voulons, c’est réunir le positif des possibilités qui existent. Climate Express a pour objectif de mobiliser et d’appeler à l’action pour un monde où justice sociale et forces de la nature sont en équilibre. »

Actuellement, Climate Express projette d’organiser une mobilisation de masse en Belgique pour se rendre à la COP21, c’est-à-dire la conférence internationale sur le climat qui se tiendra à Paris en novembre 2015. « Nous avons lancé un appel à marcher sur Paris. Les manifestants viendront de tous les pays à pied, à vélo, go-kart, cheval, charrette, train, etc. ! Notre objectif est de rassembler 10 000 personnes en Belgique pour aller à Paris. » 

Le programme des activités

Le dimanche 29 novembre, le premier week-end de la conférence (qui se tiendra du 30 novembre au 11 décembre), aura lieu une grande mobilisation. Les organisateurs espèrent en effet mobiliser un demi-million de personnes au total. « Au cours du second week-end aura lieu une conférence alternative et, pour le dernier week-end, toutes sortes d’actions ludiques sont prévues. Pour s’y rendre, des transports seront organisés. Une seconde grande marche est aussi prévue, où les résultats de la conférence sur le climat seront examinés d’un œil critique. Quel que soit le résultat, nous voulons qu’à la fin de celui-ci il y ait des actions concrètes de la part des politiques et le maintien de la pression de l’associatif sur ceux-ci. Mais le principal objectif est de rassembler 10 000 participants belges à la première manifestation. »

Celui qui pense que ce voyage à Paris se limitera à monter dans un car ou un train, déambuler, scander quelques slogans puis renter à la maison se trompe. « Toutes sortes d’activités sont prévues. Il y aura des actions, des assemblées populaires, et même des petites fêtes. L’idée est de créer des moments où les gens peuvent réfléchir sur la question climatique et ensemble développer une opinion commune. Un peu comme cela s’est fait sur le train pour Varsovie. Durant le voyage en car ou en train, tant à l’aller qu’au retour, nous disposerons à chaque fois de quatre heures pour discuter et s’instruire. C’est de cette manière que nous envisageons de motiver les gens à travailler et à continuer de travailler sur cette question. »

Rassembler les masses

Rassembler autant de personnes pour se rendre à Paris n’est pas une sinécure. Or c’est indispensable, car seule une mobilisation de masse permettra d’exercer, de l’extérieur, une pression sur les négociateurs. « Il ressort des entretiens que nous avons eus avec certains négociateurs que c’est une chose à laquelle ils sont sensibles. Si les rues de Paris sont envahies par les manifestants, cela permettra d’accroître la pression et le soutien pour réclamer des mesures sérieuses. Et même si ce soutien est minime, il aura un impact sur le processus.

Mais ce que nous voulons avant tout avec cette grande marche c’est montrer au monde que l’appel à la prise de mesures sérieuses contre le réchauffement climatique est énorme et que nous sommes capables de rassembler des milliers de gens autour de ce thème. »

Il ne s’agit d’ailleurs pas que de la lutte contre le réchauffement climatique, mais aussi de prendre en compte l’aspect social. « Un des principes de Climate Express est de militer à la fois pour le climat et la justice sociale. Le problème du climat est intrinsèquement lié au problème social, puisque les plus démunis sur Terre sont les principales victimes des déréglements climatiques alors qu’ils en sont les moins responsables. Même dans les régions où les conséquences sont moins importantes, les groupes les plus vulnérables de la population sont ceux qui en souffrent le plus. »

Paris, un début

« La lutte sociale et la lutte écologique doivent être menées conjointement. L’une peut renforcer l’autre. C’est aussi pour cette raison que notre voyage à Varsovie a été aussi captivant : la rencontre entre deux groupes et un échange enrichissant de points de vue. C’est en réunissant dans un même train des syndicats, des mouvements écologiques et des organisations Nord-Sud que nous avons pu créer les conditions pour cet échange. »

Et après Paris ? « La mobilisation pour Paris est pour l’instant notre principal projet, mais après Paris nous envisageons de poursuivre l’action avec Climate Express. Ce que nous voulons, c’est mobiliser et créer un mouvement, un cadre qui incite et stimule les gens à agir davantage, soit via leur propre association, soit individuellement au sein du mouvement Climate Express. À terme, nous espérons devenir une organisation bénéficiant d’un vaste soutien, ouverte aux individus et aux associations, qui, chacun à sa manière, apportent leur contribution. La conférence climatique de Paris est donc pour nous aussi un début. »