




Discours de Peter Mertens, président du PTB, à ManiFiesta, samedi 20 septembre 2014, Bredene.
Bonjour ManiFiesta,
Bonjour, dans ce pays aux neuf Parlements, aux deux rois et même trois reines, aux dix provinces mais quand même onze gouverneurs, et surtout… au nouveau gouvernement de droite.
Un gouvernement de droite qui, sous ses habits, amène de sombres nuages.
De sombres nuages. D’austérité. De régression.
« Nous devons faire preuve de courage », dit Charles Michel, des libéraux francophones.
Il s’agit du courage de former un gouvernement de patrons,
il s’agit du courage de former un gouvernement de la minorité pour la partie francophone du pays. Il s’agit du courage de se liguer avec tous ceux qui considèrent les gens et la planète comme de simples engrenages dans leur course au profit maximal.
Quel est ce courage, qui fait payer les petits et n’ose pas toucher aux grands ?
Quel est ce courage, qui fait payer les petits et n’ose pas toucher aux grands ?
Quel est ce courage, qui fait travailler les gens plus longtemps, jusqu’à leurs 65 ans, et leur retire encore de 100 à 300 euros de pension ?
Quel est ce courage, qui se plie devant les diktats européens et impose un régime d’austérité à toute la population, alors que l’on refuse d’instaurer un impôt sur la fortune pour la petite couche supérieure ?
Quel est ce courage, qui impose un plan de délestage aux villes et communes belges parce que, après dix ans de libéralisation, il est désormais impossible d’assurer l’approvisionnement en électricité ?
Et quel est ce courage, qui fait qu’on claque les talons devant l’OTAN et, qu’en pleine crise, on commande à l’industrie militaire américaine 40 avions de guerre au coût hallucinant ? Pour 6 milliards d’euros, une somme qui permettrait de faire disparaître la pauvreté dans notre pays, et qui permettrait de faire encore bien d’autres choses.
Non, chers amis et camarades, le vrai courage, c’est tout autre chose.
Le vrai courage signifie : se dresser face à l’injustice.
Le vrai courage signifie : développer soi-même une vision pour sortir de la crise, et ne plus être le paillasson des grands patrons, des lobbys du nucléaire et de l’industrie militaire.
Le vrai courage signifie : s’adresser aux responsables de la crise.
La bonne nouvelle : dans notre pays, il existe un mouvement de gens courageux.
La bonne nouvelle : dans notre pays, il existe un mouvement de gens courageux.
Un contre-mouvement, qui se dresse face à l’injustice.
Et une partie de ce mouvement est aujourd’hui présente à ManiFiesta.
National et international.
Sur ce podium ont pris la parole, entre autres, Michel Meyer de la FGTB, Stefaan Vanthourenhout de la CSC, Wouter Hillaert de la plateforme Hart boven Hard, la célèbre militante des droits civiques aux États-Unis Angela Davis, et bien sûr Fadwa Barghouti, de Palestine.
Ce qui les relie, c’est la solidarité. Ce qui nous relie, c’est la solidarité.
Ils méritent un tonnerre d’applaudissements.
Aujourd’hui, beaucoup d’Angela et de Fadwa sont présents. Femmes et hommes porte-parole de la petite et de la grande résistance. Mais toujours de la résistance sociale !
Regardez autour de vous.
Ceci est la fête de la solidarité.
Ceci est la fête de ceux qui ont le soleil dans leur poche, comme on décrivait Julien Lahaut à son époque.
Ceci est la fête de ceux qui ne se laissent pas diviser.
Ni par la langue qu’ils parlent à la maison. Ni par le lieu où ils sont nés. Ni par leur prénom, par leur religion, par leur sexe ou par leur orientation sexuelle.
Ceci est la fête de l’unité. La fête de Malika de Schaarbeek, d’André d’Alost, de Céline de Bastogne. Ceci est votre fête.
Aujourd’hui, ici, nous sommes plus de 11 000 !
Lorsque, il y a quatre ans, avec Solidaire et Médecine pour le Peuple, nous avons organisé pour la première fois ManiFiesta, personne ne croyait plus qu’un jour plus de 11 000 personnes se rassembleraient pour un festival de solidarité.
C’était l’année après la chute des banques. Et on nous a dit alors qu’il fallait intervenir rapidement, sinon toute l’économie s’effondrerait. C’était une question de survie collective.
Aujourd’hui, plusieurs questions s’imposent.
A-t-on parlé de responsabilisation lors de la chute des banques, et a-t-on alors exigé que ces banques puissent se redresser toutes seules ?
A-t-on demandé aux banquiers de suivre des formations à l’Onem pour prouver qu’ils savaient faire leur boulot ?
Leur a-t-on alors parlé de travail d’intérêt général obligatoire ? Il s’agissait tout de même de gens qui avaient amené la société au bord du gouffre ?
Tout le monde connaît la réponse. On ne leur a rien demandé du tout.
Non, on leur a donné de l’argent. Beaucoup d’argent.
Les banquiers européens ont reçu une injection de 1.600 milliards d’euros pour s’en sortir. Ils sont devenus les plus gros allocataires du continent.
Les banquiers européens ont reçu une injection de 1.600 milliards d’euros pour s’en sortir.
Ils sont devenus les plus gros allocataires du continent.
Dans ce pays, on impose aux gens qui doivent vivre d’une allocation de plus en plus de conditions. On doit être disponible, suivre des formations, on ne doit surtout pas être trop exigeant.
Et celui qui ne satisfait pas à ces conditions est sanctionné.
Pour une classe de personnes, il y a très peu de soutien, beaucoup de conditions et de dures sanctions.
Pour une autre classe, il y a beaucoup de soutien, aucune condition et aucune sanction.
Oui, nous vivons dans un pays où il y a deux démocraties.
Et ce ne sont pas les démocraties du Nord et du Sud du pays.
C’est la démocratie de celui qui a beaucoup d’argent, et la démocratie de celui qui n’en a pas. Et le mur entre les deux devient de plus en plus haut.
Ce mur, nous devons l’abattre.
Cette année sera celle de la résistance sociale. Avec, comme symbole, le cactus : sympathique et piquant. Qui porte les épines de la résistance et de l’indignation.
Mais l’indignation ne suffit pas.
Nous ne pouvons pas juste rejeter la vision dominante.
Nous avons besoin de notre propre vision des choses. Sur ce que le monde pourrait être. Sur ce que le monde devrait être.
Nous avons besoin de notre propre langue. Pas de la langue de la bourse, mais de la langue des gens.
Nous avons besoin de notre propre « nous ». Non pas un « nous » étriqué ou nationaliste. Et pas non plus un « nous » de beaux parleurs, un « nous » du genre « nous sommes quand même tous dans le même bateau ».
Nous avons besoin d’une vision propre, d’une langue propre, mais surtout d’un projet propre. Une alternative que nous construisons ensemble
Nous avons besoin d’un « nous » empli de fierté. Nous sommes les créateurs de richesse. Nous sommes ceux qui, par notre travail, créent la richesse mais en recevons de moins en moins en retour. Sans travailleurs, pas de richesse ! Un « nous » des 99 %.
Nous avons besoin d’une vision propre, d’une langue propre, mais surtout d’un projet propre. Une alternative que nous construisons ensemble. Un plan d’avenir. Un plan radical, car « la radicalité n’est rien d’autre que prendre le problème à la racine », comme l’a dit Angela Davis.
Les épines du cactus sont le symbole de la résistance sociale et de l’indignation, mais elles sont tout autant les aiguillons du renouveau social, écologique et démocratique.
D’où notre plan, notre Plan Cactus. Avec Raoul Hedebouw, député PTB à la Chambre, j’ai présenté ce plan à la presse.
Avec ces épines, nous voulons crever les ballons de l’austérité que les négociateurs gouvernementaux lâchent jour après jour.
Nous travaillons à une alternative à la politique asociale du gouvernement de droite. Un ambitieux plan d’investissements qui donne aux gens une place centrale, et non au profit maximal des multinationales et des multimillionnaires.
Un plan d’avenir, avec trois leviers forts : le renouveau social, le renouveau écologique et le renouveau démocratique.
Le renouveau social est plus que jamais nécessaire. Car ce que nous vivons aujourd’hui, c’est la démolition sociale.
Le renouveau social est plus que jamais nécessaire. Car ce que nous vivons aujourd’hui, c’est la démolition sociale.
Cette semaine, j’ai entendu aux infos l’histoire terrible de Frank Van Den Bleeken. Cet homme est ce qu’on appelle un « interné ». Quelqu’un qui a des problèmes psychiatriques et qui se retrouve en prison par manque d’institution de soins adaptés. Il n’a aucun accompagnement psychique, aucun soin médical adéquat.
Cette semaine, Frank Van Den Bleeken a demandé l’euthanasie. Parce qu’il ne voyait plus d’issue à ses souffrances. Parce qu’il n’a jamais reçu les soins dont il avait besoin.
Et Frank n’est pas le seul. Il y a aussi des personnes âgées et lourdement handicapées qui demandent l’euthanasie parce qu’elles n’ont pas les moyens financiers de se payer des soins.
C’est la faillite du système des soins. La faillite d’une société qui économise à en mourir.
La seule chose qui compte encore, ce sont les chiffres de rendement et l’output économique. Le commerce a tout infiltré. Dans certaines maisons de repos, on ne tient plus compte de la qualité des soins, mais on calcule le nombre de langes et le nombre de minutes que le personnel peut consacrer à un patient.
Comment peut-on encore prétendre que l’on se soucie des plus faibles de la société, quand des personnes handicapées restent pendant des années sur des listes d’attente, et doivent finalement aller en justice pour obtenir leur droit à des soins ?
Comment peut-on encore prétendre que les soins de santé sont un « droit », quand les gouvernements tant flamand et wallon que le fédéral à venir veulent imposer de nouvelles économies au secteur ?
Comment peut-on encore prétendre que les soins aux personnes sont essentiels à une société, alors qu’on laisse toujours plus ce secteur aux chasseurs de rendement du libre marché ?
Le marché ne se soucie pas de l’intérêt général, le marché n’est pas centré sur la consultation et la participation des citoyens, le marché ne part pas de la solidarité, qui est la base d’une société digne. La chasse au profit mène à la sélection, où c’est celui qui a le plus gros portefeuille qui peut se payer des soins.
Et c’est pourquoi, chers amis et camarades, il faut arrêter d’économiser dans le secteur des soins. Parce que cela mène à des drames.
Ce dont nous avons besoin, c’est d’un renouveau social au lieu d’un recul social. Nous devons investir dans les maisons de repos, dans les crèches, dans les soins de santé mentale. Ça, c’est le progrès. Ça, c’est une politique sociale.
Le renouveau social, c’est aussi investir dans un enseignement de qualité et accessible à tous. Il faut arrêter d’économiser dans l’enseignement, car nous détruisons notre propre avenir.
Dans notre pays, l’inégalité ne cesse d’augmenter. Et le plus grave, c’est que notre enseignement reproduit cette inégalité. Génération après génération. Que notre enseignement exclut tout un groupe de jeunes, qui ont déjà décroché dans notre société avant même d’avoir 18 ans. Et ça, c’est terrible.
Tout comme il est terrible que l’on veuille rendre l’enseignement supérieur encore plus cher. Avec des frais d’inscription jusqu’à 1 100 euros. Seul celui qui a déjà beaucoup d’argent pourra encore faire des études supérieures. Et ainsi, l’origine sociale ou la richesse deviennent le critère pour le niveau d’études. Comme au dix-neuvième siècle.
Au lieu de démolir notre enseignement, il faut au contraire y investir davantage. Plus d’écoles, avec plus d’accompagnement et des classes plus petites. Un enseignement où chaque enfant a sa place. Un enseignement dont chacun peut sortir avec un diplôme. Un enseignement avec une infrastructure de qualité, et une large vision pédagogique. Ça, c’est le renouveau social dont nous parlons. Investir dans l’avenir, dans des services collectifs développés, dans une sécurité sociale forte, dans la culture, dans les emplois et les salaires.
Outre le renouveau social, il est grand temps d’un renouveau écologique. D’ailleurs, pour le climat, cela fait longtemps qu’il n’est plus minuit moins cinq, mais minuit cinq.
En 2013, sur notre planète, la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère et les océans a augmenté à une vitesse jamais vue et a atteint un nouveau record. La quantité de CO2 est aujourd’hui supérieure de près de moitié à ce qu’elle était en 1750, avant que l’homme commence à produire à grande échelle.
Donc, que plus personne n’ose prétendre que la crise climatique n’existe pas !
Allez dire ça en Afrique, où le désert ne cesse d’avancer et où les sources d’eau s’assèchent.
Allez dire ça en Asie, où les paysans pauvres observent le ciel avec anxiété, parce que les pluies de la mousson se font attendre.
Allez dire ça aux Philippins, où l’ouragan Hayan a fait des milliers de morts.
Savez-vous ce que dit la célèbre activiste Naomi Klein ? « Oubliez tout ce que vous savez sur le réchauffement climatique : le problème, ce n’est pas le CO2. Le problème s’appelle : capitalisme. » Mais elle ajoute : « Il y a cependant une bonne nouvelle : nous pouvons aussi saisir cette crise du climat pour transformer notre système économique qui est un échec et en faire quelque chose de radicalement meilleur. »
Naomi Klein a tout à fait raison. Nous devons changer, maintenant, avant que le climat ne change tout.
C’est pourquoi il nous faut un renouveau écologique, parce que l’on ne peut pas continuer comme ça.
Les 200 plus grands monopoles de l’énergie dans le monde investissent chaque année 650 milliards de dollars dans la recherche de nouvelles sources pétrolières, au lieu d’investir dans les technologies durables et l’innovation écologique.
Les géants de l’énergie ont lancé de nouvelles centrales au charbon au lieu de construire des parcs d’éoliennes.
Nos gouvernements achètent des millions de mètres cubes d’air pur en Pologne, au lieu de travailler ici à la qualité de l’air.
Le marché ne résoudra pas la crise climatique, et les multinationales non plus. Nous devons leur reprendre le gouvernail de la société
Et Electrabel et compagnie maintient les centrales nucléaires de Doel 1 et 2 ouvertes dix années de plus, au lieu d’investir dans la production d’énergie verte. Pour Electrabel, c’est le profit qui compte, pas les gens ou l’environnement.
Le marché ne résoudra pas la crise climatique, et les multinationales non plus. Nous devons leur reprendre le gouvernail de la société.
Le renouveau écologique, c’est : investir dans des entreprises d’énergie publiques sous contrôle démocratique, au niveau local et national. Nous remplaçons le chaos du libre marché par le développement planifié d’un système d’énergie durable.
C’est : miser sur la recherche scientifique pour des technologies et transports écologiques et des sources d’énergie durable, indépendamment des intérêts des entreprises privées et des mécanismes de marché.
C’est : œuvrer pour un réseau de transports publics moderne, dense, fiable et à un prix abordable. Investir dans l’isolation et l’économie d’énergie. Et oser penser à la mobilité écologique, en favorisant le transport par train des marchandises ou des routes adaptées aux cyclistes.
La résistance sociale, cela veut dire aussi : défendre une politique du climat socialement juste. Demain a lieu la « People's Climate March », la marche citoyenne pour le climat, la plus grande marche qui ait jamais eu lieu, dans 150 pays, également en Belgique, à Bruxelles.
Change the system, not the climate
Comme à Copenhague en 2009, nous ferons entendre à Paris : « Change the system, not the climate ! »
Dans notre pays, la démocratie mérite bien une révision en profondeur. Car comment peut-on encore parler de démocratie quand c’est l’élite financière qui tire toutes les ficelles ?
Comme l’écrit le jeune auteur britannique Owen Jones dans son nouveau libre, The Establishment : « les plus pauvres voient leur sécurité sociale réduite et démantelée. Mais on jette la richesse aux multinationales et aux multimillionnaires comme jamais auparavant. C’est le socialisme pour les riches, et le capitalisme pour nous. La question n’est pas de savoir si cela est équitable. La question est : combien de temps cela peut-il encore durer ? »
Et la réponse est : non, cela ne peut plus durer.
Cela ne peut plus durer que 85 personnes sur cette planète possèdent autant que les 3,5 milliards des autres êtres humains.
C’est une quantité d’argent obscène dans les mains d’un minuscule nombre de gens. La planète ne peut se permettre le luxe de laisser une telle concentration de richesse dans les mains de quelques personnes.
Cela ne peut plus continuer que les gouvernements font des restrictions dans les services publics, pour offrir des milliards en cadeau aux multinationales et aux multimillionnaires qui croulent sous l’argent.
Le renouveau démocratique commence par la remise en question du statu quo, par le refus de cet enrichissement inadmissible de quelques-uns aux dépens d’une masse d’autres
Cela ne peut plus durer qu’il y ait près de 600.000 chômeurs dans notre pays ; que la pauvreté augmente chez les jeunes, chez les familles monoparentales, chez les personnes âgées ; alors que, de l’autre côté, le nombre de multimillionnaires dans notre pays a encore augmenté de 12 000 en un an. En pleine crise !
Ce n’est apparemment pas la crise pour tout le monde.
Le renouveau démocratique commence par la remise en question du statu quo, par le refus de cet enrichissement inadmissible de quelques-uns aux dépens d’une masse d’autres.
Le fisc connaît le salaire et l’épargne de tout travailleur jusqu’au moindre centime. Mais les fortunes de l’establishment restent protégées. Mais qu’en est-il, au juste, de ces fortunes ?
Tout projet démocratique commence par établir la carte exacte de ces fortunes. Ce n’est pas par hasard qu’une des premières mesures de la Révolution française a été l’établissement d’un cadastre des fortunes.
Mais, en Belgique, 225 ans après la Révolution française, il n’existe toujours pas de cadastre des fortunes. Il est temps que cette tâche élémentaire de démocratie soit effectuée, et qu’un inventaire des richesses soit dressé dans notre pays. Établissons la carte de la richesse. Et activons cette richesse, pour à nouveau investir dans la société, au lieu de la cacher dans des paradis fiscaux.
Le renouveau démocratique, cela signifie aussi que nous décidons nous-mêmes de notre avenir. Ce n’est pas le cas aujourd’hui.
Pouvez-vous donner votre avis ?
Et ce que vous dites change-t-il réellement quelque chose ?
Pouvons-nous exercer une influence sur le cours des choses ?
Telles sont les questions autour desquelles devrait tourner une démocratie.
Et puis, je vous demande, à vous.
Quel est le caractère démocratique du Pacte européen qui interdit quasiment à tous les pays de faire de grands investissements publics ; qui les oblige à détruire leur tissu social et culturel pour économiser ; un pacte qui n’a jamais été soumis à la population ?
Quel est le caractère démocratique de la décision de libéraliser le marché de l’énergie ; ou de celle de faire entrer la Poste en bourse et de la privatiser ? Quel large débat public y a-t-il eu avant ces décisions ?
Et quel est le caractère démocratique des négociations qui se tiennent en ce moment, dans le secret complet, sur un grand accord de libre-échange transatlantique avec les États-Unis ? Quel caractère démocratique a l’élaboration d’un tel pacte secret qui a de lourdes conséquences sociales, écologiques et démocratiques, et dont la population ne sait pour ainsi dire rien ?
La démocratie, c’est une véritable participation, une consultation et un contrôle sur les entreprises publiques
Non, chers amis et camarades, cela n’est pas démocratique. Les peuples d’Europe devraient avoir le droit de se prononcer sur les traités et pactes qui déterminent nos vies.
Ça, c’est le renouveau démocratique. Pour ne pas considérer le peuple comme un ennemi, un opposant, un électeur qui noircit juste une petite case tous les quatre ans.
La démocratie, c’est une véritable participation, une consultation et un contrôle sur les entreprises publiques. La démocratie, c’est protéger les droits syndicaux, renforcer le monde associatif et faire en sorte que la justice soit accessible. Ça, c’est le renouveau démocratique.
Un plan ambitieux pour un avenir social, durable et démocratique est impossible sans une réforme fiscale drastique. Au lieu de faire porter la crise à la population, ce sont les épaules les plus fortes qui doivent porter les charges les plus lourdes.
Et cela commence par une taxe des millionnaires, un impôt sur la fortune de ceux qui sont richissimes. Dans son ouvrage Le Capital au XXIe siècle, l’économiste français Thomas Piketty consacre un millier de pages à l’analyse de l’inégalité criante. Et sa conclusion ne laisse pas de place au doute : « La seule solution est un impôt mondial sur la fortune. » Et il ajoute : « Si l’on veut que cela avance, il faut commencer par son propre pays. »
Eh bien, nous voulons que cela avance. Et vite.
Nous soutenons une tolérance zéro pour la grande fraude fiscale. Car aujourd’hui, la justice conclut des arrangements avec les fraudeurs, en leur permettant d’échapper à un procès contre un payement minime
Dans notre Plan Cactus, outre une taxe sur la fortune, nous proposons encore d’autres mesures.
Nous parlons de justice fiscale pour défendre un impôt juste sur les entreprises. Aujourd’hui, les 1000 entreprises qui font les plus gros bénéfices paient à peine 6% d’impôt. Nous voulons qu’elles paient le taux d’imposition normal de 33,99%.
Nous soutenons une tolérance zéro pour la grande fraude fiscale. Car aujourd’hui, la justice conclut des arrangements avec les fraudeurs, en leur permettant d’échapper à un procès contre un payement minime.
Nous défendons une taxe sur la spéculation, car aujourd’hui les spéculateurs en bourse ne paient aucune taxe sur les profits qu’ils réalisent.
Nous voulons enfin un fonds d’énergies vertes. Car aujourd’hui, il est grand temps que l’on supprime intégralement les bénéfices usuraires d’Electrabel et que l’on investisse nous-mêmes dans la production d’électricité durable.
La patience, c’est fini. C’en est assez !
« Faire la grève ne résout rien, a récemment dit Bart De Wever. On n’échappera de toute façon pas à l’austérité. »
Si la grève ne résolvait rien, monsieur De Wever, il n’y aurait aujourd’hui pas de sécurité sociale, pas d’assurance-maladie et pas de congés payés.
Tout ce que nous avons aujourd’hui, tout notre progrès social, nous l’avons arraché de haute lutte, par la résistance sociale. Parce que les « sans-dents » – il faut oser le dire – ont montré les dents et ont mordu dans la lutte sociale.
« Cela semble toujours impossible, disait le regretté Nelson Mandela, jusqu’à ce qu’on l’ait fait. »
Abolir l’esclavage était « impossible ». Jusqu’à ce que les Français l’aient fait, après la Révolution française.
Interdire le travail des enfants était « impossible », jusqu’à ce que le mouvement ouvrier de ce pays décide que c’en était assez et retire les enfants de la mine et des usines textiles.
Supprimer l’apartheid était « impossible », jusqu’à ce que l’ANC fasse abolir la ségrégation raciale en Afrique du Sud.
Rien n’est impossible. Nous sommes dans une profonde crise sociale, écologique et démocratique. Faisons entendre notre propre vision, forgeons notre propre plan, parlons notre propre langue. Renforçons la résistance sociale.
Aujourd’hui, nous sommes plus de 11 000 à ManiFiesta.
Si la grève ne résolvait rien, monsieur De Wever, il n’y aurait aujourd’hui pas de sécurité sociale, pas d’assurance-maladie et pas de congés payés
Dimanche se déroule à Bruxelles la marche citoyenne pour le climat.
Lundi, la plateforme Hart boven Hard, regroupant une cinquantaine d’organisations socioculturelles flamandes, remettra sa Déclaration de septembre alternative au gouvernement flamand. Le même jour, dans trois villes, à Gand, Bruxelles et Anvers, auront lieu des soirées de débats et de réflexions contre l’austérité imposée par le gouvernement flamand.
Mardi, les trois syndicats organisent une action d’avertissement sur la place de la Monnaie, à Bruxelles. 5.000 militants syndicaux sont prévus.
Entre-temps, en Flandre, les étudiants font circuler des pétitions contre l’augmentation des frais d’inscription dans l’enseignement supérieur.
Et le PTB apporte lui aussi sa pierre à la résistance sociale croissante. Je vous invite à marcher avec nous à la « Protestparade », le dimanche 19 octobre à Bruxelles. Une protestation créative et combative contre la casse sociale et la folie de l’austérité. Mais surtout : pour un renouveau social, écologique et démocratique. Cela peut changer, et cela doit changer !
Je conclus avec un poème de Charles Ducal, qui a reçu le titre de « poète national ».
Ceci est le mur. La pensée s’arrête ici.
Les explications gisent, épuisées, au sol.
Le pays est malade. Il n’y a pas de remède.
Cela tient à la pluie, cela tient au soleil.
Peut-être si nous honorions à nouveau les dieux…
Peut-être avec un nouveau leadership fort…
Peut-être si nous travaillions jusqu’à en crever…
Peut-être si l’on punissait vite et fort…
Ceci est le mur. Derrière habitent les seigneurs.
Peut-être ne faut-il y percer qu’un trou.
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