




Armand De Decker est présenté comme l’homme clé de l’affaire Chodiev en Belgique. Pourtant, un faisceau concordant d’indices démontre que le principal acteur belge du dossier serait plutôt le vice-Premier ministre Didier Reynders. Une analyse du député du PTB Marco Van Hees.
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La French connection du mousquetaire Reynders
En 2014 déjà, Le Vif-L'Express1 mentionne le nom de Didier Reynders dans l'affaire Chodiev. Reynders et De Decker y sont pointés comme des membres de la Confrérie des mousquetaires d'Armagnac, où ils ont été intronisés en 2010. L'information est d'ailleurs fièrement annoncée sur le site internet personnel du ministre2.
Cette confrérie est présidée par Aymeri de Montesquiou, descendant direct de d'Artagnan et ancien représentant spécial du président Nicolas Sarkozy en Asie centrale (cette partie du monde où l'on trouve le Kazakhstan). Jean-François Étienne des Rosaies, chargé de mission à l'Élysée, serait aussi membre de la confrérie. Et tant de Montesquiou que des Rosaies et De Decker sont dans le collimateur de la justice française, qui semble être passée à côté d'un des Lieutenants Aides de Camp de l'Escadron Europe de la Confrérie des mousquetaires d'Armagnac, un certain Didier Reynders3.
Le secrétaire général de l’Élysée aurait passé un appel direct au ministre belge, ami du président.
En 2015, c'est Le Monde qui cite le nom de Didier Reynders, comme partie prenante aux discussions sur le cas Chodiev, avec Claude Guéant, ancien ministre de Sarkozy. Le secrétaire général de l’Élysée aurait passé un appel direct au ministre belge, ami du président.
Et le quotidien français ajoute un autre élément, un mail attribué à Étienne des Rosaies dans lequel on peut lire : « Pour résoudre cette affaire, un texte de loi a été voté il y a un mois, organisé et suscité par Armand De Decker, qui a sensibilisé trois ministres : Justice, Finances et Affaires étrangères ». Le Soir publiera in extenso en novembre 2016 ce document qui mouille donc Stefaan De Clerck (CD&V), Didier Reynders (MR) et Steven Vanackere (CD&V).
Le Monde, notamment, va également citer l'ingénieur ucclois Guy Vanden Berghe, également mis en examen par la justice française, qui aurait affirmé aux enquêteurs que Reynders, ami personnel de Sarkozy, aurait arrangé par téléphone avec Claude Guéant la mise en relation de Catherine Degoul, avocate de Chodiev, avec De Decker. Durant son audition judiciaire en 2015, lors de sa garde à vue en France, Vanden Berghe déclare : « Il me semble qu’elle (NDLR : Degoul) a été mise en relation avec De Decker directement de Paris à Bruxelles par téléphone, entre homologues de même niveau, Guéant pour la France et Reynders pour la Belgique » (procès-verbal 302.531/2015 du 6 mai 2015)4.
En novembre 2016, ces informations ressortent dans la presse belge de manière plus étoffée, détails et pièces à l'appui. En particulier le fameux mail de Jean-François Etienne des Rosaies à Claude Guéant, envoyé le 19 juin 2011, soit deux jours après la transaction pénale favorable à Chodiev. Il rappelle que le président kazakh Nazarbaïev avait sollicité le président Sarkozy deux ans auparavant, « pour trouver un soutien politique en Belgique en faveur de son ami » Patokh Chodiev, alors qu’un marché de plusieurs centaines de millions d’euros, portant sur l’achat de 45 hélicoptères du groupe Eurocopter, était en voie de conclusion finale entre Paris et Astana. Le contrat franco-kazakh a été officiellement signé le 27 juin 2011, soit dix jours après la transaction pénale.
Et le mail précise donc que « pour résoudre cette affaire, un texte de loi a été voté, il y a un mois, organisé et suscité par Armand De Decker qui a sensibilisé trois ministres : Justice, Finances et Affaires étrangères ». Didier Reynders dément avec cet argument qui vaut ce qu'il vaut : il avait déjà opposé un démenti à de telles informations en 2015.
Les enquêteurs français relèveront que les annotations « Ministère des Finances » et « Ministère de la Justice » se trouvaient dans l'agenda de Catherine Degoul. Mais l'avocate explique qu'il s'agissait seulement du règlement bancaire de la transaction pénale et qu'elle ne savait pas à quel ministère verser le montant5.
L'acte déterminant qui va permettre à Chodiev d'éviter un procès, c'est cet amendement déposé à la dernière minute à la Commission Finances de la Chambre lors des débats sur la loi portant des dispositions diverses, en mars 2011. Qui est à l'initiative de cet amendement qui introduit la transaction pénale élargie dans la législation ? Le cabinet Reynders.
C'est ce que confie la députée Opend VLD Carina Van Cauter au Vif/L'Express et au Standaard en 2013 : elle explique qu'un membre du cabinet de Didier Reynders est venu la voir. « Il savait que je défendais un projet de transaction pénale depuis 2009. Il m'a suggéré la tactique de l'amendement pour aller plus vite. Je n'y ai rien vu d'anormal6. » Alors qu'elle ne siégeait pas normalement dans la Commission Finances, c'est malgré tout là qu'elle va y défendre un amendement que signeront également des députés de tous les partis de la majorité : Servais Verherstraeten (CD&V), Gwendolyn Rutten (Open Vld), Guy Coëme (PS), Josy Arens (cdH), Raf Terwingen (CD&V) et Philippe Goffin (MR).
C'est un amendement bancal, non analysé par le Conseil d’État, qui est ainsi adopté en toute vitesse, comme s'il y avait une urgence à adopter cette disposition.
C'est un amendement bancal, non analysé par le Conseil d’État, qui est ainsi adopté en toute vitesse, comme s'il y avait une urgence à adopter cette disposition qui traîne depuis des années dans diverses propositions de loi. Et le fait qu'il soit traité en commission Finances plutôt qu'en commission Justice va choquer plusieurs parlementaires, y compris de la majorité. Didier Reynders évite toutefois de venir lui-même en commission Finances défendre le projet de loi portant des dispositions diverses ainsi amendé : il envoie son secrétaire d’État Bernard Clerfayt (FDF).
Au Sénat, les pressions sur les parlementaires continuent. Les ministres Didier Reynders et Stefaan De Clerck veulent éviter le passage devant la commission de la Justice du Sénat pour éviter discussions et retard7. Mais le texte passe tout de même dans cette commission où il fait l'objet d'audition d'experts, mais toujours à un rythme soutenu puisque les réunions se succèdent les 16, 22, 23 et 24 mars 2011.
Les experts relèvent une faille fatale dans le dispositif légal de la transaction pénale élargie. Mais une nouvelle pression gouvernementale va pousser les sénateurs à voter le texte sans une correction qu'ils savent tellement indispensable qu'ils vont s'atteler directement à la rédaction d'une loi réparatrice.
La libérale Christine Defraigne, alors présidente de la commission Justice du Sénat, fait état de ces pression en janvier 2013 au Vif/L'Express et au Standaard : « Il y avait une pression très forte de la part du gouvernement pour que ça passe rapidement. C'était discuté au plus haut niveau. Mais on ne pouvait accepter la proposition telle quelle, elle était très imparfaite. Lorsqu'on a décidé de procéder à des auditions d'experts, les téléphones ont chauffé. A cause du deal avec le secret bancaire, disait-on. »
Mais peu importe l'argumentation pour adopter la transaction pénale, pourvu que cela aille vite, car d'autres pressions venant de son parti expliquent l'urgence par la nécessité de faire entrer rapidement de l'argent dans les caisses de l’État. C'est ce que la secrétaire-adjoint du groupe MR au Sénat explique à Defraigne, selon ce que cette dernière rapportera aux enquêteurs français. Et manifestement, la secrétaire lui transmettait un message venant de plus haut8.
Lorsque Didier Reynders se défend de toute intervention en arguant que ce n'est pas lui, mais le gouvernement qui faisait pression pour que la loi passe au pas de charge, il semble oublier qu'il fait partie de ce gouvernement, et précisément la partie encline à demander la transaction pénale élargie (même si certains partis flamands ont pu y voir, au même moment, une opportunité pour leurs amis diamantaires).
La loi sur la transaction pénale était un de ces chevaux de bataille
Ce rôle de Reynders au sein du gouvernement, Yves Leterme le confirme au journal De Morgen : « Het was toen een erg belangrijk politiek dossier, déclare le Premier ministre de l'époque. Hij was erg actief bezig met deze materie en nam de afkoopwet erg ter harte. Het was een van zijn strijdpunten9. » (C’était une question politique très importante. Il a été très actif sur ce dossier et a pris très à cœur la loi sur la transaction pénale. C’était un de ces chevaux de bataille)
Et un autre Vice-Premier d'alors enfonce le clou : « Dit is een heel vreemd stukje geschiedenis. Het is onmogelijk dat het kabinet van Reynders niet op de hoogte was dat de afkoopwet versneld zou worden goedgekeurd. Mij ga je niet vertellen dat hij, of iemand van zijn kabinet, niet benaderd is geweest door iemand van Chodiev10. » (C’est une très étrange partie de l’histoire. Il est impossible que le cabinet Reynders ne soit pas au courant que la loi sur la transaction pénale serait votée en vitesse. Je ne peux pas croire que ni lui ni quelqu’un de son cabinet n’ait pas été approché par quelqu’un de l’entourage de Chodiev)
Reynders justifie la précipitation de la Chambre et du Sénat par le fait qu'il fallait faire appliquer un deal gouvernemental : « Le devoir du gouvernement de l’époque était de traduire un accord sur la levée du secret bancaire et l’élargissement de la transaction financière en matière pénale11. »
C'est une présentation tronquée de la réalité puisque la levée du secret bancaire est décidée par le gouvernement dès 2010 et qu'il se retrouve dans l'avant-projet de loi et le projet de loi de ce qui deviendra la loi du 14 avril 2011 portant des dispositions diverses.
Par contre, la transaction pénale est introduite en dernière minute par l'amendement de Carina Van Cauter et consorts. À la lecture des débats parlementaires, certains signataires (Van Cauter) nient le deal, d'autres (Verherstraeten) le reconnaissent. Mais même si ce deal est réel, il n'enlève rien à la question essentielle : pourquoi, tout d'un coup, Didier Reynders met dans la balance, pour accepter une levée du secret bancaire dont son propre cabinet a rédigé le projet de loi, un nouvel élément – la transaction bancaire – qu'il aurait pu insérer dans ce même projet s'il avait fait l'objet d'un accord dès le départ au gouvernement : la levée de secret bancaire contre l'introduction de la transaction pénale élargie ?
Si Reynders fait introduire précipitamment la transaction pénale par un amendement en mars 2011, avec ou sans deal gouvernemental, c'est parce qu'il y a urgence. Et cette urgence se nomme Patokh Chodiev.
Plaçons le curseur en France en nous mettant à la place du président Sarkozy. Dès lors qu'il entend satisfaire la demande du président kazakh d'éviter une condamnation de Chodiev en Belgique, quelle est la première démarche qu'il doit logiquement entreprendre ? Activer ses plus hauts contacts au sein de l’État belge.
« Pour dire les choses simplement, Didier est mon ami, et je suis fier d'être le sien. »
Or, il a un fidèle ami qui y est vice-Premier ministre et ministre des Finances : Didier Reynders. Ami ? Le terme est-il exagéré ? Il est en tout cas respectivement employé par les deux… amis dans la biographie12 que le journaliste André Gilain consacre en 2007 au Liégeois d'Uccle.
La préface signée… Nicolas Sarkozy – sur le point d'être élu président – commence par « Je connais bien Didier Reynders » et finit par « Et pour dire les choses simplement, Didier est mon ami, et je suis fier d'être le sien. » De son côté, Reynders confie : « Avant tout, c'est un ami. je le connais depuis des années : à une période où il n'était pas dans la position de force qui est la sienne actuellement13. »
Le biographe ajoute : « Leurs liens sont tels que, le 28 novembre 2004, Didier Reynders fut invité au Bourget, pour le couronnement de Nicolas Sarkozy à la tête de son parti. Le président du MR y a été mieux traité que certains barons du gaullisme14. »
De plus, Reynders et Sarkozy ont des amis communs. À commencer par Armand De Decker. Mais également le couple Albert Frère – Bernard Arnault, co-propriétaires du prestigieux Saint-Émilion Château Cheval blanc, comptant tous deux parmi les invités triés sur le volet au Fouquet’s, où le président Sarkozy fête sa victoire électorale. Et si l'on connaît les bonnes relations de De Decker avec Arnault, qui s'est installé à Uccle – commune jumelée à Neuilly, fief de Sarkozy – et a demandé la nationalité belge (avec moins de succès que Chodiev), Reynders est quant à lui un proche d'Albert Frère, invité tantôt à déjeuner à l'appartement ixellois du milliardaire carolo, tant à loger dans sa villa de Marrakech. Voici donc tout un nœud de relations aux sommets des mondes franco-belges de la politique et des affaires.
Début 2012, le président Sarkozy offre la Légion d'honneur à Didier Reynders. Une décoration qu'il vient lui remettre personnellement à Bruxelles, en 2013. Une récompense possible pour le rôle du ministre belge dans l'affaire Chodiev et/ou la cession de Fortis à BNP Paribas pour un prix dérisoire. Il est vrai que précédemment, Reynders avait remis l'Ordre de Léopold à Sarkozy. Et les deux fois, De Decker est convié au repas de ses amis. Difficile d'imaginer que leurs plans à trois ne s'appliquent pas à l'affaire Chodiev.
Durant la période transitoire allant du 16 mai 2011, date de promulgation de la première loi sur la transaction pénale élargie, au 11 août 2011, date de promulgation de la loi de réparation, aucune transaction ne devait normalement être conclue.
Par une étrange coïncidence, les deux transactions pénales conclues dans la période interdite de mai-août 2011 conduisent donc à Nicolas Sarkozy.
Pourtant, deux transactions sont conclues pendant cette période de trois mois. L'une, au parquet de Bruxelles, concerne Patokh Chodiev et date du 17 juin. L'autre est conclue au parquet d'Anvers, selon la réponse du ministre Koen Geens à des questions parlementaires : « D'après une vérification manuelle effectuée auprès des cinq parquets généraux, outre le dossier dont il est question [le dossier Chodiev], il ne semble y avoir eu, sans certitude absolue, dans la période concernée, qu'un seul dossier dans le ressort de la cour d'appel d'Anvers où une transaction pénale a clôturé la procédure pour certains prévenus, les autres préférant poursuivre la procédure15. »
Nous avons retrouvé le principal bénéficiaire de cette transaction. Il s'agit de la Société générale, l'une des principales banques françaises. D'après un article du Tijd16, la banque était le pivot dans une construction frauduleuse regroupant une vingtaine d'entreprises belges. Elle a conclu une transaction de 40 millions d'euros pour éviter un procès.
À l'époque, la Société générale a Frédéric Oudéa pour PDG. Il avait été nommé à la tête de la banque en 2008, après l'affaire Kerviel, avec la mission de redorer la réputation de l'institution. Dans ce cadre, il valait certainement mieux payer une transaction que de se voir traîner au tribunal.
Frédéric Oudéa est proche de Nicolas Sarkozy. Il a fait partie de ses conseillers lorsque celui-ci était ministre du Budget. Les deux hommes partagent d'ailleurs des origines hongroises. Oudéa a aussi pour ami François Pérol, secrétaire général adjoint du président Sarkozy.
Par une étrange coïncidence, les deux transactions pénales conclues dans la période interdite de mai-août 2011 conduisent donc à Nicolas Sarkozy, l'ami de Didier Reynders...
L'affaire Chodiev comporte un florilège exceptionnel de pressions entre États, trafics d'influences et autres violations de la séparation des pouvoirs. Mais ce qui est peut-être le plus choquant, c'est le fait de voter une loi générale pour satisfaire un intérêt particulier.
L'affaire Chodiev n'est qu'un remake de ce qui a déjà été réalisé dans les années antérieures du mandat de Reynders.
Or, dans cette discipline, Didier Reynders n'en est pas à son coup d'essai. Cette pratique reyndersienne mérite donc d'être présentée car elle éclaire le cheminement législatif de l'affaire Chodiev en ce qu'elle n'est qu'un remake de ce qui a déjà été réalisé dans les années antérieures du mandat du libéral comme ministre des Finances.
En cause, trois lois portant sur des dispositions fiscales particulièrement controversées : intérêts notionnels, excess profit rulings et la déduction pour revenus de brevet. Ces législations sont du sur-mesure pour quelques bénéficiaires précis bénéficiant d'une grande écoute auprès du ministre. Pire, dans les trois cas, ce n'est pas le législateur qui rédige la loi (ce qui est devenu la règle générale) mais ce n'est même pas le cabinet du ministre. Ce sont directement les bénéficiaires des mesures qui tiennent le stylo.
Les Excess Profits Rulings ont été introduits en 2004 à l'article 185 §2 du Code des impôt sur les revenus pour remplacer le ruling infocap, condamnée par l'Union européenne, dont bénéficiait une petite poignée de multinationales conseillées par les Big Four. Qui a rédigé cette loi introduite par Didier Reynders ? Le magazine Trends le révèle : « Isabel Verlinden (PwC) is het brein achter de 'excess profit rulings'17 » (Isabel Verlinden (PwC) est le cerveau derrière les 'excess profit rulings').
Les intérêts notionnels, votés en 2005, ont également remplacé une disposition condamnée par l'Union européenne, les centres de coordination, réservé à une centaine de multinationales (dont le Centre de coordination de Carmeuse, dont Reynders était administrateur avant de devenir ministre). Qui a rédigé le dispositif des notionnels ? Michel Alloo, qui est alors à la fois chef de la fiscalité chez Umicore et président de la commission fiscale de la FEB. Il ira même à la Chambre pour voir sa loi être votée : « Je me suis offert un petit plaisir en guise de récompense, se souvient-il. J'ai assisté aux débats parlementaires. C'était extraordinaire18 ! »
La déduction pour revenus de brevets (articles 205/1 à 205/4 du code des impôts sur les revenus) est, elle, votée en 2007. C'est toujours Reynders qui est ministre des Finances. D'où vient l'idée de la loi ? De la « Plate-forme Pharma R&D », lobby créé par GSK et Janssen Pharmaceutica, rejointes ensuite par Pfizer et UCB. C'est la branche belge du bureau d'avocats Linklaters, cabinet attitré de GSK, qui s'en charge. Ces avocats vont même participer à la rédaction du FAQ publié sur le site du SPF Finances. L'un deux confie : « C'est clair, on n'a pas été payé par le cabinet Reynders pour rédiger cette loi19 ».
C'est clairement Didier Reynders – il ne dément pas – qui lance l'impulsion de la disposition légale introduisant la transaction pénale élargie en faisant pression sur la députée Van Cauter. Et ces pressions vont se poursuivre au Sénat. Au sein du gouvernement, c'est également Reynders qui pousse le dossier, se souvient Yves Leterme, alors Premier ministre.
L'acte déterminant permettant à Chodiev d'éviter un procès est donc posé par le ministre libéral. Ce dernier nie le rapport de cause à effet entre la loi sur la transaction et l'affaire Chodiev, mais ses explications ne tiennent pas trop la route et, d'autre part, la simultanéité des deux événements et l'urgence extrême des travaux parlementaires peuvent difficilement être considérées comme de pures coïncidences.
De plus, le président français Nicolas Sarkozy, qui cherche à satisfaire la demande du président kazakh, trouve en son vieil ami Didier Reynders le relais le mieux placé du pays pour permettre que cette requête aboutisse. Et plusieurs sources mentionnent des contacts entre le ministre belge et l’Élisée dans cette affaire.
Bref, un important faisceau d'indices désigne celui qui est toujours Vice-Premier ministre dans le gouvernement fédéral comme ayant eu un rôle clé dans l'affaire Chodiev.
En tout cas, les conditions de la gestation de la loi du 16 avril 2011 élargissant la transaction pénale, élaborée sur mesure pour des intérêts privés, en disent long sur la disposition elle-même. Expression d'une justice de classe au profit de ceux qui ont les moyens d'acheter l'évitement d'un procès, elle s'organise dans les coulisses d'une négociation qui ouvre potentiellement la porte à tous les abus.
1. Le Vif-L'Express, 22-10-2014.
2. http://www.didierreynders.be/2010/10/16/didier-reynders-intronise-mousquetaire-darmagnac/
3. http://www.mousquetaires.asso.fr/fr/actualites-escadron-europe
4. Le Soir, 19-11-16.
5. Le Vif-L'Express, 18-11-2016.
6. Le Vif-L'Express, 18-11-2016.
7. La Libre Belgique, 9-10-2012.
8. Le Vif-L'Express, 18-11-2016.
9. De Morgen, 22-11-2016.
10 .De Morgen, 22-11-2016.
11. lesoir.be 20-11-2016.
12. André Gilain, Didier Reynders: La face cachée de l'iceberg, éditions Luc Pire, 2007.
13. Ibidem, p. 189.
14. Ibidem, p. 36.
15. Commission justice de la Chambre, compte-rendu intégral, 16-11-2016.
16. De Tijd, 22-7-2011.
17. Dans Trends du 4 février 2016 et le Trends-Tendances du 18 février 2016.
18. Trends-Tendances, 31 juillet 2008.
19. Le Vif-L'Express, 23-11-2012.
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