Partout dans le monde, les femmes s’organisent pour défendre leurs droits

L’International Women’s Strike (Grève internationale des femmes) s’est traduite par plus de 600 manifestations, suite à l’élection de Donald Trump. L’initiative s’est muée en une vague mondiale de protestation. Ici aussi, une grève des femmes a eu lieu ce 8 mars, Journée internationale des droits des femmes. Explications de Sarah Scheepers, co-organisatrice de la grève.  

Sarah Scheepers. Ça a débuté par un post sur Facebook en Argentine. Quelques femmes ont dit : « Nous pourrions le faire aussi… » Nous avons contacté les organisatrices en Argentine et elles nous ont expliqué que nous devions rédiger notre propre cahier de revendications pour que les grèves puissent être solidaires au niveau mondial avec les revendications des femmes des autres pays. C’est ainsi qu’un mouvement né aux États-Unis s’est transformé en protestations mondiales d’hommes et de femmes contre le néolibéralisme.

L’action s’appelait Women’s Strike, mais il n’y a pas eu grève partout… 

Sarah Scheepers. Dès le début, dans l’appel international, il a été clair que d’autres formes de résistance étaient possibles, en dehors d’arrêter le travail. Bien des femmes n’ont pas de protection syndicale et, pour elles, faire grève est risqué. Un grand nombre d’entre elles ont un contrat précaire. Nous avons rédigé une liste de choses qu’on pouvait faire le 8 mars, travailler en vêtements noirs, ne pas travailler pendant quelques heures, instaurer un « out-of-office » (configurer un message automatique d’absence sur son e-mail, NdlR) avec le message de la grève, participer à une marche des femmes, distribuer des tracts le matin dans une gare... 

Il était important de promouvoir des actions locales et à petite échelle, pour que les femmes qui n’avaient jamais participé à une action se sentent quand même interpellées et s’intègrent à cet ensemble plus large. Ce « petit » début est important pour que nous nous rendions compte que nous pouvons nous organiser, que ce sont des choses qu’on peut apprendre.  

Comment se fait-il qu’ il se soit passé tant de choses en si peu de temps ? 

Sarah Scheepers. On a vraiment dépassé les limites, en fait. Le fossé entre l’« élite » et le reste de la société, au niveau mondial et au niveau local, est si large maintenant que des gens qui ne se sont jamais révoltés auparavant commencent eux aussi à se mettre en colère. Le 1 % reste sur ses positions en divisant les 99 %. Les droits des femmes sont à nouveau sous pression. Le racisme augmente, surtout envers les musulmans. Les chômeurs et les malades de longue durée sont stigmatisés. Notre État de droit s’érode sous le prétexte de la lutte contre le terrorisme. À ceux qui se plaignent, on dit que c’est la faute à celui qui se situe un échelon plus bas sur l’échelle sociale. La violence contre les femmes ? C’est la faute aux musulmans dénués de conscience de « nos valeurs » ! Vous n’avez toujours pas de logement social ? C’est la faute à tous ces profiteurs pauvres qui noircissent les listes d’attente ! Vos allocations sont trop basses ? C’est la faute aux réfugiés à qui il faut assurer un accueil ! On dresse les gens les uns contre les autres. Mais, dès qu’ils lisent entre les lignes d’un tel scénario, les gens s’insurgent et montrent alors leur solidarité.

Article publié dans le mensuel Solidaire d’avril 2017. Abonnement.