Portugal : Destitution du gouvernement de l’austérité. Prochaine formation d’un gouvernement de gauche ?

Mardi 10 novembre, le gouvernement de droite a été destitué par l’assemblée de la république. Un gouvernement soutenue par les trois formations de gauche et appliquant un programme alternatif pourrait voir le jour.

Les élections du 4 octobre avaient conduit à la défaite de la coalition de droite au pouvoir depuis 5 ans. Pendant plusieurs années, le peuple portugais a subit les assauts de sa politique d’austérité européenne aux conséquences sociales désastreuses. Le pays compte maintenant 2 millions de pauvres sur une population de 10 millions d’habitants. C’est un sur cinq.

Lors du dernier scrutin, les électeurs ont en fait élu une majorité de parlementaires de gauche : du PS, du Bloc de gauche et du Parti communiste portugais (PCP). Plus d’un million de citoyens ont voté à gauche de la social-démocratie. Sans oublier que les précédents gouvernements socialistes avaient eux aussi mené des politiques néolibérales, les trois partis ont rapidement débuté des négociations en vue d’établir un programme commun, répondant aux aspirations du peuple portugais exprimées par les urnes mais aussi à travers les centaines de grèves, manifestations et assemblées populaires de la résistance sociale qui vit au Portugal. « En lui retirant plus de 700 000 voix depuis les dernières élections, les Portugais ont exprimé leur saturation vis-à-vis de l’austérité tant les attaques contre les salaires, les retraites, l’éducation et la santé publiques ont été systématiques », rappelle Jorge Pires, de la commission politique du Parti communiste portugais (PCP), à l’Humanité.

Toutefois, le 23 octobre, le Président de la République avait renouvelé le mandat du Premier Ministre de droite sortant, Passos Coelho. Il faisait un pied de nez à la constitution et aux souhaits de la majorité du pays en ignorant l’alternative majoritaire à gauche. Face à ce coup de force anti-démocratique, les trois partis (PS, PCP et BE) ont poursuivi les négociations pour finalement parvenir à un accord. Mardi 10 novembre, la majorité des élus (123 voix contre 107) a fait chuter le gouvernement de droite par une motion de censure.

D’ici quelques jours, le Président devrait (sauf nouveau coup de force) nommer le président du PS Premier Ministre. Antonio Costa formerait un gouvernement PS, potentiellement soutenu de l’extérieur par le PCP et le Bloc de gauche. Le programme législatif devrait comprendre des mesures sociales réclamées par le très large mouvement social et syndical portugais : hausse du salaire minimum, le dégel des pensions, une taxation plus juste, le maintien des services publiques.

Pour Jeronimo De Sousa, le secrétaire général du PCP, une voie est ouverte pouvant conduire aux premières étapes pour inverser le cours de l’appauvrissement et de l’exploitation des dernières années. Mais, ajoute-t-il, le parti communiste ne sera jamais « la béquille d’un autre parti ». Tout comme la Confédération générale des travailleurs portugais (CGTP), les communistes portugais insistent que leur soutien ne sera pas un chèque en blanc, mais un soutien vigilant à un programme anti-austéritaire. Sur son site le PCP est très clair : « Nous garantissons aux travailleurs et à la population que nous ne manquerons jamais et ne gâcherons aucune opportunité utile pour garantir la défense et l’affirmation de leurs droits, la valorisation de leurs revenus et la réalisation d’une vie digne. »  L’accord conclut par le PCP avec le PS insiste en effet fermement sur les mesures sociales et anti-austéritaires d’une part, sans d’autre part cacher que beaucoup de divergences subsistent.

Il est clair que l’Union Européenne et les instances financières feront pression. Comme avec la Grèce, ils mettront tout en œuvre pour imposer le maintien de leur politique d’austérité, libérale et antipopulaire. Il faudra compter sur la mobilisation des travailleurs, des étudiants, des pensionnées dans le pays ainsi que l’appui non négligeable d’une solidarité internationale se mettant aux côtés du peuple portugais.