Argentine : la mobilisation pour le droit à l'avortement continue malgré le vote du Sénat

Ce jeudi 9 août, le Sénat argentin a bloqué la légalisation de l’avortement, malgré la mobilisation de nombreuses organisations progressistes. En Argentine, les avortements clandestins tuent au moins une femme par semaine. Réaction de Nora García Nieves, coordinatrice du mouvement de femmes du parti de gauche Izquierda Unida.

Nous nous sommes réveillées aujourd’hui après une grosse raclée. À 7 voix près, l’Argentine se retrouve avec une loi vieille de presque 100 ans qui empêche les femmes de disposer de leur corps. En 200 ans, un NON n’a jamais arrêté le féminisme et ça ne va pas commencer aujourd’hui.

La décision du Sénat argentin démontre une fois de plus que certains politiciens ne sont pas à la hauteur de la société, qu’ils ne sont pas là pour écouter, gérer et construire une vie meilleure pour tous. Ceux qui nous parlent de liberté du marché disent à nouveau non à la liberté de notre corps, nous condamnant à la culpabilité, à la honte et à la mise en danger de nos vies, la vie des femmes.

Dans ce déluge idéologique, les inégalités de classe, les relations entre l’Église et l’État, le machisme et la violence s’entremêlent, et nous nous retrouvons dans un pays où entre 340 000 et 450 000 avortements clandestins ont lieu chaque année. Les politiciens ferment les yeux sur une réalité qui leur est étrangère mais qui compte pour nous : la vie des femmes pauvres. Mais les femmes pauvres vont changer le monde.

Le féminisme est un fil qui touche la planète tout entière

Ce débat social et politique ne concerne pas seulement une opération chirurgicale, il s’agit d’éviter de mettre en lumière des questions fondamentales : la liberté des femmes, la nécessité d’une éducation sexuelle féministe fondée sur le désir et un système de santé publique où nous décidons et planifions notre maternité. Ce capitalisme patriarcal, qui a besoin de nous tout en nous étouffant, a vu que nous voulions tout changer, que posséder notre corps est dangereux. Alors, il exerce son pouvoir patriarcal comme on se protège du soleil de nos mains. Mais les femmes, fatiguées de ce deux poids deux mesures, ont créé une marée verte de sensibilisation et de solidarité internationale, de soutien, d’affection et de respect. Parce que la dignité de la femme n’a pas sa place dans les formules mathématiques économiques du capitalisme ou dans les pages des livres sacrés. Le féminisme est un fil qui touche la planète tout entière, que nous saisissons avec toute la force que nous avons, avec une, deux mains, nos dents ou nos pieds. Ce néolibéralisme machiste, qui fait de nous des marchandises, qui nous exploite et tente de nous convaincre qu’il s’agit de problèmes personnels et non structurels, ne peut pas nous neutraliser ou nous faire taire.

Camarades argentines, nous avançons ensemble, la tête haute, pour mener à bien ce travail indispensable, la lutte continue, et nous sommes de plus en plus nombreuses... Pour un avortement légal, sûr et gratuit maintenant ! Nous luttons dans la rue à vos côtés.